mardi 2 février 2016

Regard sur les prémisses du modèle social des relations publiques

L’annonce du projet Oléoduc Énergie Est de TransCanada en 2013, qui, mentionnons-le, est fortement controversé et largement contesté, persiste à ce jour à susciter de nombreux débats à l’échelle du pays. Chef de file dans son domaine, TransCanada affiche fièrement ses couleurs et affirme haut et fort, à qui veut bien l’entendre, favoriser le développement économique, tout en priorisant le respect et la préservation de l’environnement canadien. 
Pourtant, nul ne semble réellement y croire et l’entreprise ne parvient guère à obtenir les résultats tant convoités auprès des publics et des organismes de règlementation. En effet, selon un sondage réalisé par la communauté métropolitaine de Montréal (CMM), 96 % des répondants considèrent le projet Énergie Est comme inutile et 94 % n’appuie pas le tracé proposé par TransCanada (1). Ayant mainte fois tentée de faire accepter son projet auprès des individus et collectivités, TransCanada a appliqué à la règle une stratégie « déloyale », qui l’exige dorénavant à admettre ses torts et donc, à se sortir la tête du sable. 
C’est donc dire qu’après trois longues années à tenter de convaincre la population canadienne, la pétrolière albertaine se trouve devant une impasse, qui la force à réviser son modèle de relations publiques, ses stratégies ainsi que ses tactiques. De retour à la case départ, TransCanada a maintenant tout à gagner à réviser le fondement de son modèle et adopter une nouvelle vision des relations publiques. Afin qu’un tel modèle puisse émerger, Mathieu Sauvé propose sept prémisses dans son ouvrage, Les relations publiques autrement- Vers un nouveau modèle de pratique (Sauvé, 2010). De manière à opérer un réel changement, TransCanada aurait particulièrement intérêt à considérer ces deux prémisses du modèle de Sauvé : 
Prémisse 1 : La société est d’abord un espace public et non un espace marchand
Le projet Oléoduc Énergie Est, est certainement la preuve que l’argent ne permet pas toujours d’obtenir l’approbation de la population. Il est vrai que TransCanada s’est donné du mal à démontrer que son projet est dans l’intérêt de tous, mais ses arguments sont limités et l’entreprise s’éternise à évoquer des retombées économiques non négligeables. De plus, TransCanada a établi auprès de ses parties prenantes une communication unidirectionnelle visant coûte que coûte, à faire accepter son projet. Pourtant, l’argumentation de TransCanada ne tient plus dans la société d’aujourd’hui. En effet, il n’existe pas d’obligation à accepter le projet Énergie Est de TransCanada et comme l’affirme le maire de Québec : « Jusqu’à date, TransCanada Pipeline n’a pas répondu à nos inquiétudes. On est quand même en 2016! Je les trouve incompétents »(2). Cette « incompétence » évoquée par Régis Labeaume s’explique entre autres par l’absence de l’entreprise dans l’espace public. Quant à lui, Denis Coderre estime que TransCanada est  « une compagnie très arrogante qui ne veut pas nous parler » (3). Il semble donc évident que les stratégies de communication de TransCanada sont dépassées et qu’il est grandement temps d’instaurer un climat d’ouverture propice à l’échange.
Prémisse 6 : Toutes les parties prenantes sont en droit de s’attendre à ce que leurs intérêts soient partiellement satisfaits
Dans la même veine que la première prémisse, TransCanada doit considérer chacune de ses parties prenantes et engager un dialogue avec ces dernières. Malgré les avis mitigés que suscite le projet Oléoduc Énergie Est, TransCanada est responsable « de concilier les intérêts contradictoires des groupes qui sont en relation directe avec elle » (Boucher et Presqueux, 2006, p.159). Plutôt que vendre son projet, TransCanada a intérêt à se rapprocher de ses parties prenantes en les conviant à des séances d’informations et de consultation. Ces séances devront permettre aux parties en présence de s’exprimer sur le sujet et d’échanger respectueusement en vue de l’atteinte d’un objectif commun. Il est donc important que l’entreprise adopte dans son modèle des relations publiques, une nouvelle dynamique d’échange qui permettra à chacune des parties prenantes d’être encadrées tout au long de ce processus de consultation. Comme Sauvé l’affirme, je crois également que toutes les parties prenantes sont en droit d’avoir des attentes vis-à-vis un projet, toutefois, il semble difficile de satisfaire chacun de leurs intérêts. L’entreprise se doit donc d’être présente sur les lieux publics afin d’établir des dialogues et démontrer qu’elle possède une écoute active vis-à-vis des préoccupations des citoyens, municipalités, organismes et groupes environnementaux. Bref, dans le cadre de ces échanges, TransCanada pourra démontrer sa volonté à coopérer à une finalité commune.
Finalement, la prémisse 7 de l’ouvrage mentionne que « […]les relationnistes- ont un rôle social à jouer qui dépasse les cadres techniques de leur pratique ». Ainsi, serait-il possible que les relationnistes de TransCanada aient oublié la position privilégiée qu’ils entretiennent avec le reste da la société? Leur rôle est-il réellement celui d’un praticien des relations publiques ou n’est-il pas plutôt mécanisé aux profits de l’organisation? 
TransCanada aurait certainement tout à gagner à humaniser son modèle de relations publiques. 

Aucun commentaire:

Publier un commentaire